16 mars 2020

Certains délais légaux suspendus – COVID-19


L’État québécois est à pied d’œuvre pour faire face aux défis soulevés par la pandémie de la COVID-19. Vous le voyez avec les points de presse quotidiens du premier ministre : plusieurs mesures sont mises en place par le gouvernement et les autorités de la santé publique.

Et la justice n’a pas été épargnée : mes collègues et moi-même avons mis les bouchées doubles pour nous assurer que les citoyens seront protégés le mieux possible contre le coronavirus, mais aussi pour protéger les droits de l’ensemble des Québécoises et Québécois.

Ainsi, la ministre de la Justice et la juge en chef du Québec ont fait entrer en vigueur des mesures d’exception en lien avec certains délais légaux, durant la période pendant laquelle les citoyens doivent limiter leurs interactions. Sonia LeBel a utilisé pour ce faire un arrêté ministériel qui sera en vigueur tout au long de la période d’urgence sanitaire.  

Il est important de noter que la suspension de délais ne vise que les dossiers en matière civile, soit ceux qui concernent surtout des réclamations monétaires. C’est le cas par exemple des recours devant les petites créances ou devant les chambres civiles de la Cour du Québec et de la Cour supérieure. Cette suspension des délais vise également les procédures en matière civile devant la Cour d’appel.

Il est donc important de comprendre que les délais en matières criminelle et pénale ne sont pas visés par cet arrêté ministériel, non plus que les délais applicables aux procédures devant les tribunaux administratifs.

Ce sont les délais de prescription extinctive et de déchéance ainsi que les délais de procédure civile qui sont visés par cette décision.

Les délais de prescription extinctive et de déchéance correspondent à la limite de temps après laquelle une personne peut perdre un droit, tel que le droit d’entreprendre une poursuite en dommages-intérêts.

Les délais de procédure civile, eux, réfèrent à l’ensemble du calendrier fixé dans le cadre d’un dossier judiciaire pour effectuer une action, par exemple mener un interrogatoire.

Comment fonctionne la suspension?

La suspension des délais débute le 15 mars 2020 et sera en vigueur pour toute la durée de l’état d’urgence sanitaire. Cela signifie que les délais sont figés pendant cette période et recommenceront à courir lorsque l’état d’urgence sanitaire sera levé. S’il vous restait par exemple 5 jours pour poursuivre votre voisin en raison du délai de prescription, vous aurez 5 jours pour le faire lorsque l’état d’urgence sanitaire sera levé. Même chose si vous aviez 5 jours pour déposer une preuve dans votre dossier en fonction du délai de procédure.

Une exception : les affaires urgentes

Notez qu’une exception est prévue, soit les affaires jugées urgentes par les tribunaux. Dans le cas de ces dossiers urgents, les délais de procédure ne sont pas suspendus étant donné que le dossier doit être entendu rapidement par le tribunal. C’est le cas par exemple en matière familiale, si un parent demande un changement de garde urgent, les délais de procédure s’appliqueront afin que la cour puisse rendre son jugement promptement.

Des questions?

Si vous avez des questions, nous vous recommandons de communiquer avec votre avocat, ou encore avec le Centre de communication avec la clientèle du Ministère, au 1 866 563-5140. Il est également possible de trouver une foule de renseignements sur le site Web du Ministère.

12 commentaires:

  1. Bonjour. La principale différence entre un délai de prescription et un délai de déchéance est que ce dernier ne peut faire l'objet d'une suspension. L'article 27 du Cpc mentionne les délais de procédure et les délais de prescription, mais pas les délais de déchéance. Quelle est l'assise légale du pouvoir de la Ministre pour ordonner la suspension des délais de déchéance? (Notez que je comprends l'intention, laquelle n'est que très louable. Je ne m'interroge que sur la validité légale de cette partie de l'arrêté.)

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    1. Votre question est intéressante, mais le contexte de ce blogue ne me permet pas d'y répondre. En effet, l'esprit de ce véhicule de communication est de vulgariser de l'information à caractère juridique pour les citoyens, et non pas de servir de forum pour débattre de questions de droit, aussi passionnantes puissent-elles l'être. Merci de votre intérêt!

      Alex

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  2. Bonjour,

    L'arrêté ministériel suspend-il la computation des délais d'un préavis d'exercice d'un droit hypothécaire?
    Merci.

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    1. L'arrêté ministériel suspend les délais de prescription extinctive et de déchéance en matière civile jusqu'à l'expiration de la période de la déclaration d'état d'urgence sanitaire. De même, les délais de procédure civile sont suspendus durant cette période, à l'exception des affaires jugées urgentes par les tribunaux.

      Les délais liés aux préavis d'exercice d'un droit hypothécaire relèvent du droit civil et ne sont pas considérés comme étant des délais de procédure. De plus, il ne s'agit pas d'un délai de prescription ni d'un délai de déchéance, étant donné qu'à son expiration, le prêteur hypothécaire (qu'on appelle le créancier) doit déposer une demande au tribunal afin d'exercer son droit hypothécaire, tel que la prise en paiement ou la vente sous contrôle de justice.

      Pour répondre clairement à votre question, non, l'arrêté ministériel ne suspend pas les délais d'un préavis d'exercice d'un droit hypothécaire.

      Alex

      NB: Cette réponse ne doit pas être interprétée comme une opinion juridique et le recours à un conseiller juridique est recommandé afin d'obtenir des conseils sur votre situation particulière.

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  3. Bonjour. J'ai une petite question: est-ce que cela concerne également le délai d'appel pour un divorce à l'amiable?

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    1. Bonjour,

      Pour des conseils juridiques liés spécifiquement à votre dossier particulier, je vous invite à vous adresser à votre avocat ou, au Centre de justice de proximité le plus près de chez vous : https://www.justicedeproximite.qc.ca/

      Alex

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  4. Bonjour,
    le délai de l'article 1947 du code civil du Québec pour les demandes devant le tribunal administratif du logement, est il concerné par la suspension de l'arrêté 2020-4251 ?

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    1. Bonjour,

      L'évolution de la situation liée à la pandémie de COVID-19 a poussé les autorités à modifier certaines mesures qui avaient été prises en mars dernier, quand je vous écrivais à ce sujet. Ainsi, certains délais relatifs au Tribunal administratif du logement ont été levés le 10 juin par le décret 615-2020, d'autres, le 6 juillet ou le 20 juillet par l'arrêté 4282 de la juge en chef du Québec et du ministre de la Justice, et d'autres, le 1er septembre par l'arrêté 4303 du de la juge en chef du Québec et du ministre de la Justice.

      Pour vous assurer d'avoir une réponse fiable par rapport à votre situation spécifique, je vous invite à consulter un conseiller juridique. Vous pouvez également poser une question par courriel au Tribunal administratif du logement: https://www.tal.gouv.qc.ca/fr/nous-joindre

      Alex

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  5. En matière de vente pour le non-paiement de taxes foncières, le délai d'un an (qualifié de délai de déchéance)pour retraire un immeuble a aussi été suspendu pour 170 jours. À l'article 1057 du Code municipal, celui qui veut retraire son immeuble doit payer 10% d'intérêts pour l'année ou partie d'année. Je me demande donc si celui qui exercera son droit de retrait plus d'un an après la vente aux enchères grâce à l'ajout de 170 jours, devra payer 10 % ou 20 % d'intérêts ?
    Merci.

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    Réponses
    1. Bonjour Monica,

      Votre question est très pointue! Pour des conseils juridiques spécifiques à votre situation, je vous invite à vous adresser à un avocat ou au Centre de justice de proximité le plus près de chez vous, qui offre des services gratuits d’information juridique, de soutien et d’orientation : https://www.justicedeproximite.qc.ca/

      Merci de votre intérêt!

      Alex

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  6. Bonjour, et merci pour cet article très informateur non spécialistes!

    Vous dites que les délais en matière pénale ne sont pas visés par cet arrêté ministériel. Je crois comprendre que le code de procédure pénal est supplétif au code de procédure civil. Dans ce cas, comment justifier/s'assurer que la suspension des délais ne s'applique pas de facto au pénal?

    Merci bien,

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  7. Bonjour,

    Dans ce billet de blogue, qui date déjà de près d'un an, je vous parlais d'un arrêté du 15 mars 2020 qui suspendait certains délais en matière civile (https://bit.ly/3cFmAeu).

    Depuis, la situation a évolué et beaucoup de mesures ont
    été prises, notamment une suspension de certains délais en matière de justice pénale (https://bit.ly/39JhNGF).

    D'ailleurs, ces mesures ont aussi eu le temps d'être levées depuis, dans le contexte de la reprise des activités judiciaires (https://bit.ly/2MxdrtB).

    Pour plus d'informations, je vous invite à consulter notre site web (Coronavirus (COVID-19) : https://bit.ly/2LfnLFV)

    Je vous remercie de votre intérêt.

    Alex

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