Ces dernières années, nous avons amplement entendu parler de cas
de violence sexuelle, dont plusieurs ont été hautement médiatisés. De nombreux
féminicides ont également fait la manchette, ce qui a alarmé l’ensemble de la
société et attiré l’attention sur les personnes victimes de violence sexuelle
et de violence conjugale. Les statistiques démontrent qu’elles dénoncent peu
les crimes dont elles sont victimes. Heureusement, nous assistons depuis
quelques années à un changement des mentalités, où les personnes victimes sont
davantage entendues et prises au sérieux.
À l’instar de la société québécoise, le ministère de la Justice
opère en ce moment un important changement de culture, dans lequel il replace les
personnes victimes au centre du processus de guérison et de leur parcours judiciaire.
Plus que jamais, nous nous faisons un devoir de répondre aux besoins des
personnes victimes de violence sexuelle ou conjugale. C’est pourquoi nous
travaillons en collaboration avec d’autres ministères et différents partenaires
sur le terrain afin de mieux soutenir les personnes victimes à chacune des
étapes de leur parcours. Voici les principales initiatives mises sur pied :
Rebâtir
Avant de quitter un milieu violent, il est normal de se
questionner sur ses droits, ses recours légaux, la garde de ses enfants, son
bail… C’est entre autres pour répondre à toutes ces interrogations que la Commission
des services juridiques a créé le service Rebâtir,
en collaboration avec l’organisme Juripop et le Ministère. Ce service permet
aux personnes victimes de violence sexuelle ou conjugale de profiter de quatre
heures de consultation juridique gratuites, sans égard à leur revenu.
Aide financière d’urgence
L’aide
financière d’urgence est un nouveau service qui permet à une personne de
quitter rapidement un milieu qui compromet sa sécurité ou celle d’une personne
à sa charge (son enfant, par exemple). Cette aide s’adresse aux personnes
victimes de violence sexuelle et de violence conjugale. Elle couvre les frais
de transport, d’hébergement et de subsistance de la personne victime pour une
brève période, en attendant qu’elle ait accès à une ressource d’hébergement
sécuritaire. Cette aide peut également couvrir les frais médicaux en lien avec
la violence subie.
Les demandes d’aide financière sont effectuées par les
intervenantes et intervenants qui sont en lien direct avec les personnes
victimes en situation d’urgence. La Ligne d’aide financière d’urgence a été
créée expressément pour répondre à ces demandes.
Pour l’instant, ce service est offert uniquement à Laval, en
Montérégie, dans les Laurentides, à Lanaudière et dans la Capitale-Nationale,
mais il sera progressivement déployé sur l’ensemble du territoire québécois.
Réseau des centres d’aide aux
victimes d’actes criminels (CAVAC)
Depuis leur reconnaissance
officielle en 1988 par la Loi sur l’aide aux victimes d’actes criminels,
les centres d’aide aux victimes d’actes criminels
(CAVAC) offrent des services volontaires, gratuits et confidentiels de première
ligne à toute personne victime d’une infraction criminelle et à ses proches,
ainsi qu’aux témoins d’une telle infraction.
Les CAVAC travaillent en collaboration
avec de nombreux intervenants et intervenantes du milieu judiciaire, du réseau
de la santé et des services sociaux et des organismes communautaires en vue d’offrir
une vaste gamme de services, dont un accompagnement tout au long du processus judiciaire.
On peut également y obtenir de l’aide psychosociale ou post-traumatique, de l’information
judiciaire, de l’assistance technique ainsi que de l’orientation vers des
ressources spécialisées. Les CAVAC travaillent aussi en étroite collaboration
avec les palais de justice de leur district judiciaire.
Tribunal spécialisé
Vous avez probablement entendu parler de la création du tribunal
spécialisé en matière de violence sexuelle et de violence conjugale, ainsi que du
déploiement des 10 premiers projets pilotes dans différents districts
judiciaires. Ce tribunal spécialisé fournit aux
personnes victimes un accompagnement adapté et sécurisant avant, pendant et
après le processus judiciaire. Les personnes victimes bénéficient ainsi de
services personnalisés prodigués par des intervenantes et intervenants
adéquatement formés. L’intervenante ou l’intervenant assigné à une personne
victime voit notamment à réaliser une évaluation de sa situation et de ses
besoins, afin de lui offrir un service personnalisé et de faciliter son
parcours judiciaire. Les différents intervenants et intervenantes pouvant jouer
un rôle significatif auprès de la personne victime sont également mieux
intégrés tout au long du parcours.
Les palais de
justice où les projets pilotes sont déployés sont aussi aménagés pour que la
personne victime puisse y circuler de façon sécuritaire, en limitant les
possibilités de rencontrer la personne qui l’a agressée. Une offre de
formations sur les réalités relatives à la violence sexuelle et à la violence
conjugale est aussi rendue disponible à l’ensemble des acteurs et actrices pouvant
intervenir au tribunal spécialisé (policières et policiers, avocates et avocats
de la défense, procureures et procureurs de la couronne, etc.).
Le tribunal spécialisé vise à redonner confiance aux personnes victimes
envers le système de justice, notamment pour qu’elles n’hésitent plus à
dénoncer les violences qu’elles ont subies.
Bon à savoir
Ordonnance de protection
Si votre sécurité ou votre intégrité
physique sont menacées, vous avez droit à la protection contre une personne,
même si elle n’est pas poursuivie pour une infraction criminelle. Pour demander
une ordonnance
de protection, vous devez rédiger une demande, idéalement avec l’aide d’une
avocate ou d’un avocat, la déposer au greffe de la Cour supérieure, et ensuite
la transmettre par l’entremise d’une huissière ou d’un huissier à la personne
qui vous menace. Une ressource du service Rebâtir ou d’un organisme d’aide aux
personnes victimes peut vous aider dans cette démarche.
Résiliation de
bail
En cas de
violence conjugale ou d’agression sexuelle, vous avez le droit de faire une
demande afin de mettre
fin à votre bail, même si vous n’avez pas porté plainte à la police. Que votre
bail soit en location ou en sous-location, vous pouvez faire une demande de
résiliation de bail si votre sécurité ou celle d’un enfant habitant avec vous
est menacée. Les intervenantes et intervenants des CAVAC ou des centres d’aide et de lutte contre
les agressions à caractère sexuel (CALACS) peuvent vous aider dans vos
démarches.
Des ressources
Bien qu’on en parle de plus en
plus ouvertement, la violence sexuelle et la violence conjugale continuent de
faire de trop nombreuses victimes qui souffrent souvent en silence. Si vous
vous interrogez sur le comportement de votre partenaire, si vous avez besoin d’aide
ou éprouvez de l’inquiétude au sujet d’une personne de votre entourage, n’hésitez
pas à faire appel aux ressources disponibles pour vous :
1 888 933-9007
SOS violence conjugale
1 800 363-9010
À très bientôt pour un prochain billet!
Marie-Andrée Garneau
Avocate et porte-parole du ministère de la Justice